Et que meurent les roses !

J’ai eu quelques amours.

Des réelles, des rêvées, des avortées, des interdites, des passionnées.

Il y a le tout premier, dont j’ai oublié le prénom, qui me filait ses bons points contre des bécots que nous faisions claquer pour faire « comme les grands ».

Il y a celui qu’il aurait fallut et celui qu’il ne fallait pas.
Il y a celui qui guérit et celui qui part.
Il y a celle qui rend folle et celui qui réveille.
Il y a celui qu’on croit impossible et celui qu’on sait mieux sans soi.

S’il fallait aujourd’hui que je tombe amoureuse, ce serait d’être bouleversée. Je n’aimerais pas les mêmes mots cents fois prononcés, dégoulinants de miel. C’est pour les amateurs le miel, pour ceux qui n’ont rien compris aux gonzesses déglinguées.

Moi je voudrais que tu disent des mots d’une saveur particulière. Je les voudrais à la confiture de pétales de roses. Je voudrais que tu dépiautes consciencieusement chaque fleur du bouquet que tu pensais m’offrir. Que tu haches minutieusement chaque pétale et que tu les ébouillantes avec entrain. Je voudrais que tu les noies ensuite dans le sucre avant de les mettre dans leur jolie tombe en verre.

Je voudrais des mots sortis d’un pot de confiotte de roses assassinées. Et je la mangerais en y trempant les doigts, même si les miens sont biscornus et que j’en foutrais partout. Ça me ferait tout drôle dans la bouche et dans le ventre et je saurais alors que t’es quelqu’un de bouleversant. Je le saurais au goût de tes mots à la confiture de pétales de roses crevées posés sur mes doigts tordus .

Et je t’offrirais alors toute ma prose, parfois quelques rimes, et des alexandrins pour la frime. Tu pourrais goûter mes mots, un peu rances de t’avoir attendu. Tu pourrais peut-être même les aimer. Et ce serait beau.