✨Les fines traces scintillantes✨

Entre février et juillet dernier, je me suis formée à l’approche narrative, une technique particulière, presque une philosophie, pour accompagner l’autre sur son chemin de vie. Entre deux sessions de formation à la résilience, ces 12 jours passés au sein du Laboratoire Narratif1 m’ont permis de jouer avec ma fillette intérieure, de réveiller la poétesse qui dormait en moi et d’écrire de nouvelles histoires à mon propos comme sur le monde qui m’entoure. Ça a été un voyage extraordinaire.

Lorsque j’ai eu le formateur au téléphone au moment de mon inscription, je lui expliqué que je n’étais ni Coach, ni professionnel de l’accompagnement. Je lui ai demandé s’il y avait un prérequis pour pouvoir suivre la formation et il m’a répondu sur un ton très sérieux : Oui il y a une condition sur laquelle nous ne dérangeons pas. Quand j’ai entendu ça, j’ai immédiatement pensé que c’était mort, que je n’avais ni les compétences ni l’expérience pour intégrer cette formation et que vraiment je ne me prenais pas pour n’importe qui en osant prétendre être acceptée. J’attendais donc la suite de sa réponse tout en regardant mon espoir s’envoler dans la stratosphère quand il m’a dit : on demande une chose à nos laborantin.e.s , qu’ils ou elles soit gentil.le.s ! Sur le coup j’ai cru que c’était une blague et je lui ai demandé de répéter. Il m’a confirmé que c’était l’unique prérequis, que la gentillesse était indispensable pour suivre leur formation. Je lui ai répondu en rigolant que mon deuxième prénom était Caroline et que j’adorais faire des tartes aux pommes en attendant Charles et les enfants. Voilà qui officialisa mon entrée au Labo !

Je ne sais pas vraiment vous expliquer ce qu’on y fait dans ce laboratoire, aussi je vous fais un copier/coller de ce qui est inscrit sur leur page d’accueil :

Le laboratoire narratif s’adresse à tous les explorateurs d’histoires de vie, aux détricoteurs de normes, aux pisteurs de fines traces scintillantes… un laboratoire où professionnels de la relation et de l’accompagnement, où celles et ceux qui travaillent et contribuent dans le monde de la thérapie, du coaching, de l’enseignement, de la médecine, de l’éducation, du soin, des ressources humaines et du management sont accueillis pour se former à l’approche narrative. Le sens de l’humour, l’amour du beau et de la poésie ne peuvent être qu’encouragés voire un indispensable bagage pour qui se met en chemin vers l’approche narrative et ses intentions si particulières.

Quant à l’approche narrative, je vais essayer de vous l’expliquer telle que je l’ai comprise : notre identité est construite par nos relations, notre milieu social, notre culture, le pays dans lequel nous vivons et tout ce qui nous entoure et nous façonne. Les histoires qui découlent de cette construction, que nous nous racontons sans cesse ou que les autres racontent à notre propos sont malheureusement trop souvent des histoires de problèmes. Je suis trop ceci et pas assez cela.Tu devrais faire comme ci et arrêter d’être comme ça. Ça ne se dit pas. Ça ne se fait pas.

L’approche narrative nous invite à prendre conscience de ces histoires de problèmes, à les déconstruire en leur préférant des histoires alternatives qui nous conviennent mieux et nous permettent de sortir de situation parfois douloureuses et compliquées. Cette approche permet à la personne de découvrir les trésors enfouis en elle, les capacités qu’elle peut déployer et les ressources dont elle dispose déjà sans le savoir. Ce sont ces fines traces scintillantes que les praticien.ne.s narratif.ve.s vont mettre en lumière afin de les faire briller dans les yeux de la personne accompagnée. Ainsi elle redevient auteure de sa vie.

En tant que nouvelle praticienne, j’apprends à tisser ces fils scintillants et j’alimente mon imaginaire par de fabuleuses histoires, d’incroyables nouvelles, de sublimes poésies et de merveilleux contes. À cet effet, je lis en ce moment « La bible du hibou » d’Henri Gougaud, un condensé de légendes horrifiques venues de toute la France. Je ne résiste pas au plaisir de vous en partager une tendre bourguignonne. Et à demain pour une huitième surprise ;-)

À Dijon autrefois, vécurent les époux les plus aimants du monde. Il s’appelait Hilaire, elle s’appelait Quiéta. Quarante années durant, chacun fut le bonheur et le souci de l’autre, et chacun tous les soirs pria Dieu en secret de les faire mourir ensemble, un même jour. Mais Dieu ne voulut pas. Il prit d’abord Hilaire. Un an après sa mort, quand Quiéta fut portée à son tour au tombeau, ses enfants la couchèrent auprès de son époux. Alors on vit Hilaire, dont le corps était sain malgré son long trépas, sortir un bras du drap, le passer tendrement au cou de son épouse, et l’attirer à lui. Et l’on vit sa Quiéta sourire infiniment.

1 : https://lelaboratoirenarratif.com

Le son du silence

Je me demande où vont tous ces mots qui restent coincés dans la gorge. Ceux qui bloquent et font chevroter la voix. S’entassent t’ils au fond du gosier en une sourde cacophonie ? S’accrochent t’ils aux parois pour ne pas tomber dans l’oubli ? J’en ai tant garder, retenus, avant qu’ils ne puissent atteindre mes cordes vocales et devenir vivants. Les mots non-dits sont-ils d’ailleurs jamais nés ? Sont-ils morts-nés ? Ou sont-ils quelque part en attente de voir le jour ? Peut-être disparaissent-ils simplement. 

Je suis de ces personnes qui ressassent les mots qu’elles n’ont jamais prononcé. Je mâche, je salive, je chique un tabac invisible au goût de silence. Je rumine dirait l’autre. Et des mots tus, j’en ai à revendre. 

Je me fais l’effet d’un vinyle sans sillon. Le saphir caresse une galette parfaitement vierge. Seul un crépitement familier se fait entendre. L’intention est bonne, il y a quelque chose d’atypique, d’unique, dans ce silence inattendu. Mais voilà on n’en sait pas plus, le disque est muet. Inutile. 

Je me raconte les mêmes histoires depuis si longtemps que j’ai fini par les croire. Un peu comme pour le père noël et le prince charmant. Pourtant il existe bien d’autres manières d’imaginer les aventures de ce gros bonhomme ventripotent et de cet ahuri à la mèche un peu trop bien coiffée. Mais celles, communes, connues, nous vont bien. Pourquoi se torturer l’esprit ?

Je me demande si le silence des mots étouffe. Je me demande s’il pourrait un jour déborder. Les mots sortiraient-ils dans l’ordre ou emmêlés en un brouhaha incompréhensible ? Je peux les sentir à ma gorge nouée. Ce sont eux qui se tordent à m’en clouer le bec.  

J’ai eu envie d’écrire quelques uns de ces mots sur un bout de papier que j’aurais glisser sous un paillasson. Des mots jolis. Mais j’ai peur que jamais personne ne les découvre et qu’ils soient les compagnons des miettes et de la poussière. Et oser offrir des mots qui ne seront jamais lus est sûrement pire que de les garder pour soi.